Florian Kiniques
Né en 1988 en Belgique. Vit et travaille à Bruxelles.
Florian Kiniques nous entraîne dans un jeu subtil d’échanges et de traversées textuelles et visuelles, qui nous renvoie à notre condition humaine.
C’est avec délicatesse que l’artiste aborde le corps. Le corps physique comme celui de la lettre. Le pouvoir comme la faillibilité des corps et des mots.
Lorsque l’artiste décrit son installation, il parle de lattes. Ce mot désigne plusieurs choses, dont des planches de bois plates et étroites utilisées en charpenterie, mais aussi des instruments, tout aussi plats, servant à mesurer des distances entre des points et à tracer des lignes.
Les lattes de Florian Kiniques sont en verre – fragiles et précieuses, mais aussi droites et présentes – et correspondent en effet à des mesures : celles de son corps, de celui de sa compagne, de celui de son jeune fils. Chacune de ces lattes est gravée d’un mot, ou d’un fragment de mot, sur au moins l’une des surfaces, quand le mot ne traverse pas la paroi pour augmenter son potentiel de lecture.
Ces lattes qui se tiennent seules ou se retiennent entre elles, en équilibre précaire, sur les bords de l’espace de la salle, nous parlent de nous, de nos corps parlants et de la parole qui prend corps. Le choix même des mots et leur disposition créent une forme de tension entre eux : menaçant de chuter mais bien là, persistant dans leur présence secrète.
Pour son œuvre )( située au premier étage de la Maison des Arts, Florian Kiniques regarde sa compagne qui regarde le monde avec inquiétude.
Il a observé que ses préoccupations se manifestent par un froncement de sourcils qui creuse des rides verticales au-dessus de son nez. Lui qui aime prendre la mesure des choses en a fait un relevé et les a fait reproduire en or,
à taille réelle, par un bijoutier. Elles sont placées à la hauteur exacte des rides de sa compagne sur l’un des murs blancs de la salle.
On se dit bien sûr que sa compagne lui est chère. On retrouve également l’intérêt de l’artiste pour la ponctuation. Ces deux lignes fines entre les yeux, que l’artiste voit comme des « parenthèses qui se tournent le dos », au lieu d’isoler une information, s’ouvrent vers le monde pour l’interroger. C’est bien l’attention que sa compagne porte à ce qui l’entoure que l’artiste veut célébrer ici.
Texte: Lucile Bertrand