Chantal Maes

Née en 1965 en Belgique. Vit et travaille à Bruxelles.

 

De la vidéo Take A Look From The Inside, Francis Smets dit qu’elle est « un plaidoyer en faveur du balbutiement », reflet du « caractère zigzagant de la vie et de la pensée ».* La lecture bégayante d’un poème de Christian Dotremont, Qu’il nous arrive de bafouiller, « se réfléchit dans les mouvements inégaux, bredouillants et cahotants de l’enregistrement de la caméra ».
Celle-ci est littéralement couplée au corps de la lectrice, nous invitant à prendre part à ce regard depuis l’intérieur du corps parlant.

La lectrice nous entraîne à sa suite par la voix et par l’image qui tressaute en même temps que la parole trébuche. Un mot se dérobe, est récupéré et repris. Un autre mot fait à nouveau buter… Au bout du compte, le sens général du poème s’est disloqué dans l’attention portée séparément à chaque mot.
Ce serait comme marcher sur un chemin si caillouteux que l’on hésite à chaque pas et que l’on ne peut embrasser du regard le paysage alentour.

Dans Le Bruissement de la langue, Roland Barthes, écrit que « Quiconque s’apprête à parler […] doit se rendre conscient de la mise en scène que lui impose l’usage de la parole ». Une forme de contrôle de soi, donc, a priori apprise et intériorisée, mais qui ne va pas de soi, au point justement que l’on risque de se perdre soi-même comme d’égarer la personne qui nous écoute.
On voudrait pourtant faire l’apologie de l’égarement – l’art n’en est-il pas une forme ? – qui requiert de la patience et de l’attention.

Francis Smets, Le Corps anarchiste, à propos du travail de Chantal Maes.

Texte: Lucile Bertrand

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