On Kawara
1933 Kariya, Japon – 2014 New-York, USA.
Chez On Kawara persiste une forme de secret, malgré ce qu’il a livré de
lui-même à travers ses séries éditées sous les titres I Went, I Met, et I Got Up.
Comme dans la musique répétitive, le temps s’y déploie à travers les infimes décalages observés d’un mot à l’autre et d’un signe à l’autre sur la durée. Pendant une dizaine d’années, l’artiste a enregistré quotidiennement ses déplacements sur une photocopie du plan de la ville où il se trouvait, tamponnant la date au bas de chacune d’elles. L’ensemble est rassemblé en douze volumes épais : chaque double page présente un plan daté à gauche et un nom de ville à droite. On imagine l’artiste s’astreignant chaque jour à ce rituel rigoureux pour constituer sans discours, avec juste une trace et une date, la preuve de sa présence dans ces lieux.
Pour les volumes de One Million Years: Past and Future, On Kawara a énuméré le million d’années qui a précédé la conception de la série (en 1969) – “For all those who have lived and died” – et le million d’années qui a suivi son achèvement (en 1993) – “For the last one”. Malgré l’apparente froideur du protocole, les changements subtils qui se produisent à la lecture engendrent un regard humble sur notre rapport au temps et notre présence au monde. Nous sommes pris d’une sorte de vertige.
Texte: Lucile Bertrand
